mercredi 26 novembre 2014

• Retourner au centre de soi-même - Patrick Vigneau


Aujourd’hui, tous les milieux de la planète subissent l’impact de l’Homme. Certains écosystèmes sont complètement détruits par la pollution humaine.
Mais à l'heure où les forêts disparaissent, où les espèces disparaissent, où les nouvelles technologies envahissent la planète et où les problèmes environnementaux sont de plus en plus dramatiques, il existe encore en Inde, au Rajasthan, une communauté d’hommes et de femmes dont le mode de vie témoigne d’un amour et d’un respect absolus pour le monde dans lequel ils vivent. Cette communauté donne au monde une incomparable leçon d’existence en complète harmonie avec la nature. Les « Bishnoïs » ou Vishnoï sont les membres d’une communauté créée par Jambheshwar Bhagavan (1451 – 1536).

Les préceptes régissant la vie des Bishnoïs en Inde : Harmonie, compassion et dévotion sont les maîtres-mots de cette communauté écologiste régie par 29 principes fondamentaux édictés par le gourou en 1485 dans la ville de Mukam, principes auxquels ils ne dérogent pas.

Patrick Vigneau, d’abord professeur de math, vécut en Inde, fut initié au Kriya yoga puis devint sophrologue et thérapeute. Il créa l’Institut de Sophrologie transpersonnelle et le réseau de Maisons de Paix.
A  déjà publié aux éditions l'Originel Charles Antoni : Découvrir Krishnamurti, La joie d'être soi, Méditation du coeur, Le pouvoir des décisions.

© Extraits publiés avec l'aimable accord des Éditions Charles Antoni-L'Originel :

Préface

De la bienveillance à la compassion, un chemin de vie.

À partir de la description de l’existence animiste et profondément simple des Bishnoïs, hindous du Rajasthan, état du nord de l’Inde, Patrick nous invite à traverser la frontière ténue qui sépare la bienveillance de la compassion. Toutes deux exemptes de profit, elles naissent et se nourrissent d’une disposition naturelle que nous avons tous et dont les Bishnoïs ont fait la règle de leur existence : l’ouverture du coeur. 29 règles régissent le quotidien des Bishnoïs.
Certaines concernent le côté matériel de la vie et d’autres le côté spirituel. Parmi ces dernières, même si une seule évoque explicitement la méditation, toutes revêtent un aspect méditatif.
Et c’est bien de méditation qu’il s’agit tout au long de ce livre, en particulier de méditation « Heartfulness » dont la traduction française pourrait s’approcher de plénitude du coeur. « Méditer signifie retourner au centre de soi-même, dans l’espace de paix qui existe au-delà des pensées. En cet espace, la compassion et la bienveillance vivent naturellement. »
La méditation et la compassion ont une valeur commune qui est la bienveillance naturelle envers l’autre et plus généralement envers tout ce qui vit autour de nous. De tout âge et de toute région, les différentes traditions ont enseigné et pratiqué la méditation. Quelles que soient les techniques ou postures enseignées, toutes visent à pacifier l’être dans une liaison pure et directe avec ce qui se trouve ici dans l’instant. Or ce qui se trouve ici dans l’instant se situe en amont et au-delà de toutes pensées, émotions et sensations corporelles dont nous sommes témoin à chaque instant.
Aujourd’hui, nous partons en quête de ces peuples heureux, tels les Bishnoïs, qui ont intégré la méditation et la bienveillance dans leur vie quotidienne, et dont les individus vivent plus longtemps que leurs frères humains des civilisations occidentales. Nous organisons des rassemblements oecuméniques de méditants de toute confession, et en vérifions in-situ les conséquences positives sur l’environnement et les populations voisines. Nous envisageons les bienfaits de la méditation dans les hôpitaux et de la bienveillance dans les entreprises.
Il s’est même récemment ouvert à Strasbourg un diplôme universitaire de « médecine, méditation et neurosciences ».
Il est aussi auspicieux de constater l’opiniâtreté de certains penseurs qui inlassablement témoignent de leur existence simple et qui placent les bienfaits de la bienveillance, par et avec la méditation, au-dessus de toute autre pratique. Patrick est l’un d’entre eux et ce livre simple d’accès pourra constituer une méthode de guérison réellement transposable dans notre quotidien.
Denis Capdeville

Les Bishnoïs

Selon de nombreux scientifiques, nous serions en train de vivre une nouvelle extinction de masse provoquée cette fois par l’activité humaine. Le taux actuel de disparition des espèces est le plus élevé jamais enregistré (plus de 17 000 espèces disparaissent chaque année, chiffre du CNRS). Une espèce de plantes sur huit est menacée d’extinction, un cinquième de toutes les espèces vivantes pourrait disparaître dans les 30 ans. Certains estiment que l’Homme va être à l’origine d’une crise biologique majeure.
Aujourd’hui, tous les milieux de la planète subissent l’impact de l’Homme. Certains écosystèmes sont complètement détruits par la pollution humaine.
Mais à l’heure où les forêts disparaissent, où les espèces disparaissent, où les nouvelles technologies envahissent la planète et où les problèmes environnementaux sont de plus en plus dramatiques, il existe encore en Inde, au Rajasthan, une communauté d’hommes et de femmes dont le mode de vie témoigne d’un amour et d’un respect absolus pour le monde dans lequel ils vivent. Cette communauté donne au monde une incomparable leçon d’existence en complète harmonie avec la nature. Les « Bishnoïs » ou Vishnoï sont les membres d’une communauté créée par Jambheshwar Bhagavan (1451 – 1536).
Il y a plus de cinq siècles, Djambo, un jeune paysan, refusait le saccage de son pays par les plus puissants. Il assistait aux déboisements des forêts, à la sécheresse, et aux chasses royales détruisant la faune. Le fossé se creusant entre les riches et les pauvres, il n’acceptait pas la situation qui se déroulait sous ses propres yeux. En 1485, il eut une vision apocalyptique, où l’Homme méprisant l’environnement creusait sa propre tombe. Il crée alors une communauté avec quelques vagabonds. Rapidement de nombreux individus, issus de plusieurs castes, adhèrent à ce mouvement spirituel.
La communauté dont la survie tient à 29 principes simples s’accroît. La ligne directrice étant le respect total de tous les hommes et de la nature. Ces principes, ou plutôt règles de conduite, ont été édictées pour la survie des humains et des animaux et des végétaux dans un milieu désertique, mais aussi pour la libération ou le salut de l’âme. Depuis le 15ème siècle, ce peuple aspire à vivre une vie en parfaite harmonie avec le monde animal et végétal, à promouvoir la défense des valeurs environnementales, la protection des animaux et des arbres, le rejet de toute forme de violence ainsi que la compassion pour tout ce qui vit.

« Aimez les animaux. N’abattez pas les arbres. Et vous ne connaîtrez pas l’adversité dans la vie. »
Jambheshwar

Considérant les animaux et les arbres comme les membres de leur famille, les Bishnoïs leur apportent soins et affection depuis plusieurs siècles.
Chaque famille plante régulièrement des arbres, n’utilise que le bois mort pour ses besoins, construit un réservoir pour conserver l’eau de pluie et dédie une part de sa récolte aux animaux qu’elle considère comme leurs enfants (antilopes, pigeons, gazelles…). Cette dernière action est très simple : il s’agit de réserver 1/10ème de la récolte céréalière pour l’alimentation de la faune locale. En effet, « protéger et nourrir » les animaux sauvages constitue une des principales règles de conduite de cette communauté. Les femmes Bishnoïs sont connues pour leur habitude d’allaiter les faons orphelins, tandis que beaucoup d’hommes sont morts pour avoir tenté de sauver les animaux des braconniers. Outre ces principes concernant l’environnement, les Bishnoïs réprouvent la violence et le mensonge,recommandent la probité et l’humilité en société ainsi que la pratique de la méditation. Ainsi les journées et les nuits sont placées sous le signe du respect de la vie et du silence. Cela peut laisser pensif : entre paradis sur terre et vie tribale, on se prend facilement à rêver d’un monde parfait, un monde où le lion vient boire avec la gazelle, où les hommes, animaux et végétaux vivent ensemble.
En effet, chaque jour les animaux viennent chercher nourriture et eau dans les villages, ils entrent librement dans les maisons de terre et de paille. En ce monde, hommes et femmes tendent au respect mutuel, il n’y a pas de castes et la non-violence s’applique dans tous les domaines de la vie.
Car les Bishnoïs considèrent les arbres verts et les animaux comme leurs égaux et ne peuvent attenter à leur vie. Un de leurs pèlerinages annuels à Khejarli a d’ailleurs pour objectif de ne jamais leur faire oublier que 363 membres de leur communauté, essentiellement des femmes, ont péri massacrées pour avoir tenté d’empêcher l’abattage d’arbres. L’histoire remonte à l’année 1730. Le maharadjah avait alors demandé à ses soldats d’abattre les plus beaux arbres de la région pour la construction de sa future forteresse. Ses hommes se rendirent sur les terres des Bishnoïs pour abattre des arbres : les Bishnoïs sortirent de leur village, et leur demandèrent de ne pas couper les arbres, expliquant que c’était contraire à leurs préceptes religieux. Le maharadjah confirma son ordre et les soldats se mirent à couper. Alors, une femme, Amrita Dévi, ainsi que ses filles et d’autres femmes, s’interposèrent pour leur interdire cet abattage, entourant chacune un arbre de leurs bras suivies aussitôt par hommes, vieillards, jeunes. Tous prirent un arbre à bras le corps ; et les soldats coupèrent, mutilèrent, sans distinction, les arbres et les Bishnoïs avec. 363 personnes furent massacrées sans sommation. Le maharadjah, ému, leur octroya alors un territoire réservé pour qu’ils puissent vivre selon leurs principes. Depuis, ce décret a été inclus dans la législation indienne. Il n’existe pas d’autre exemples dans l’histoire humaine où des êtres humains ont offert leur vie pour sauver celle d’arbres.
Les Bishnoïs, champions de l’autarcie, fabriquaient eux-mêmes quasiment tout le nécessaire. Comme les autres habitants du désert, ils ont appris à utiliser les végétaux à bon escient et avec parcimonie. Leur connaissance en botanique, associée à leur maîtrise de l’agriculture en zone aride, leur ont permis d’atteindre des niveaux de vie plus hauts que la moyenne, et jouir ainsi d’une belle prospérité que leur envient nombre de citadins. Il est clair que la préservation de l’environnement est la stratégie qui paye ! Voilà plus de cinq siècles que les Bishnoïs ne tuent plus d’animaux sur leurs terres. Leur rendre visite, c’est à peu près à coup sûr observer de près des cerfs, des biches, des antilopes, de nombreux oiseaux dépourvus de méfiance.