jeudi 20 septembre 2007

• Tout ce qu’il y a, c’est la conscience - Gilles Pommet

Sources

Tout ce qu’il y a, c’est la conscience


Gilles Pommet


Qui veut savoir quoi ? Voilà le titre d’une vidéo qu’une amie m’a prêtée au printemps 1992. Stupéfié, je commande du même auteur une série d’enregistrements de questions et de réponses. Même réaction!

L’été suivant, je décide donc de participer à l’un de ses « ateliers » aux États-Unis. C’est tout le contraire de ce que j’ai connu jusqu’à présent : il n’y a aucune technique, aucun exercice, aucune pratique ni aucune initiation. Nous sommes environ 25 participants et le voyons deux fois par jour, à raison de deux heures par rencontre. Il parle, puis répond à nos questions.

À mon retour, je me procure deux de ses livres et prends tout l’automne pour en lire un. Le 15 janvier 1993, j’arrive en Inde où j’ai l’occasion de le rencontrer à sept reprises. Son nom : Ramesh Balsekar.

Originaire de l’Inde, Ramesh Balsekar est âgé de 76 ans, marié et père de deux enfants. Il a connu une carrière fructueuse en tant que président d’une importante banque en Inde. Une fois à la retraite, il fait la rencontre de Nisargadatta Maharaj, à qui il rend visite quotidiennement de 1978 à 1981. Quelque temps avant son décès, Nisargadatta reconnaît le plein Éveil de son disciple Ramesh et l’autorise alors à enseigner. Depuis ce temps, il n’a cessé de le faire, que ce soit à l’étranger ou chez lui, ouvrant sa porte à quiconque est intéressé à approfondir son enseignement.

Un sage

Aujourd’hui, Ramesh est généralement reconnu comme étant un sage. Comme le mot « sage » a plusieurs connotations, il importe de préciser le sens que j’entends lui prêter. Le sage est un être simple, spontané, vrai, humble, heureux et en paix. Plus précisément, chez le sage, il n’y a plus de « moi ».

Autrement dit, le sentiment d’être un individu et, par conséquent, séparé des autres est absent. L’impression de se sentir comme une personne distincte et d’être l’auteur de ses actes est complètement disparue. Le « moi », aussi appelé le « je » ou l’« égo », est totalement annihilé. Ainsi, chez le sage, on peut dire qu’il y a simplicité, spontanéité, authenticité, humilité, bonheur et paix, mais il n’y a personne pour prétendre posséder ces qualités.

Tout ce qu’il y a, c’est la conscience

Ce qui distingue principalement l’enseignement de Ramesh Balsekar des autres doctrines dans le domaine de la recherche spirituelle, c’est l’accent qu’il met sur l’inexistence du « moi ». Pour lui, ce « moi » qui croit être quelqu’un en particulier est une illusion. Tout ce qu’il y a, c’est la Conscience impersonnelle, répète-t-il très souvent.

Si nous acceptons ce fait, le « moi », celui-là même qui a l’impression d’être une personne, n’est rien d’autre que la Conscience impersonnelle qui s’est identifiée avec un organisme corps-esprit nommé individu. Cette conscience identifiée est ce-que-nous-paraissons-être, soit un phénomène temporel, limité, changeant et perceptible. En revanche, Ce-Que-Nous-Sommes est intemporel, illimité, immuable et imperceptible : c’est la Conscience impersonnelle.

L’individu : un organisme corps-esprit

Comme l’animal, l’être humain a la capacité de percevoir et de ressentir. Cependant, il est aussi doté d’un intellect qui lui donne la faculté de discriminer et d’interpréter ce qu’il perçoit. Ce pouvoir procure à l’être humain un sens d’individualité. En effet, celui-ci se prend pour un sujet, alors que le véritable sujet est la Conscience. Il y a donc usurpation de la subjectivité. Le pseudo sujet a l’impression que c’est lui qui perçoit et qui ressent. Il oublie qu’il est seulement un objet, un organisme corps-esprit à travers lequel le seul sujet, soit la Conscience, s’exprime. La capacité même de percevoir et de ressentir demeure une fonction de la Conscience.

Réincarnation et causalité

Selon Ramesh, la notion de réincarnation, selon laquelle un individu se réincarne d’une vie à l’autre, n’existe pas pour la simple raison qu’il n’y a pas d’individu. Cependant, la causalité (le karma) existe. Des actions ont lieu continuellement et elles sont les effets de causes précédentes. À leur tour, ces effets deviennent des causes qui produisent inévitablement d’autres effets. Pour que ces effets se consument, des actions doivent être accomplies. C’est alors que des organismes corps-esprit avec des caractéristiques spécifiques sont créés pour accomplir ces actions.

C’est ainsi que l’évolution suit son cours. Le tout est un processus impersonnel qui, comme le dit si bien Ramesh, « fait partie du fonctionnement de la Totalité ». En réalité, il n’y a personne derrière ces actions. Chaque organisme corps-esprit est le résultat d’un enchaînement de causes et d’effets produits par d’autres organismes corps-esprit qui ont vécu précédemment.

Le libre arbitre

Tous les jours, nous prenons des décisions et posons des actes. Toute parole ou action est précédée d’une pensée. Cela nous donne l’impression que c’est nous qui faisons le choix. Ce que nous oublions, c’est que toute pensée surgit spontanément et que le processus est tout à fait impersonnel.

En effet, nous n’avons aucun pouvoir sur la venue des pensées. Dans ce cas, qui peut vraiment prétendre avoir le pouvoir de choisir? Sur ce point, Ramesh est catégorique : le libre arbitre n’existe pas. Il va même plus loin en affirmant que le destin en entier d’un être nouveau est établi dès sa conception.

L’amour

Et l’amour dans tout ça? Pour la plupart d’entre nous, l’amour implique un être qui en aime un autre. Comme l’enseignement de Ramesh se base sur l’advaita (l’absence de dualité) dans sa forme la plus pure, ce dernier préfère utiliser le mot « unicité ». Selon lui, la question d’aimer ce qui nous entoure ne se pose plus lorsque nous sommes tout ce qui existe.

Il utilise aussi parfois le mot compassion étant donné que le mot « amour » est sujet à plusieurs interprétations. Lorsque le pseudo sujet s’évapore, la compréhension totale s’installe et la compassion s’exprime librement et dans toute sa plénitude.

En bref

Malgré les contraintes d’espace et mon initiation récente à cette approche, j’ai tenté de vous donner un aperçu de l’enseignement de Ramesh Balsekar.

Il n’est certes pas facile d’accepter et de digérer un tel enseignement. Chose certaine, c’est qu’il ne laisse personne indifférent. En effet, il peut être très ébranlant de remettre en question ce que nous avons toujours cru être. Mais cela évite de gonfler et de perpétuer cet ego qui, selon de nombreux sages de diverses traditions, est l’obstacle majeur à toute transformation profonde et ultime.

On peut donc accepter d’emblée ou rejeter du revers de la main cet enseignement. Mais de toute façon, que nous l’acceptions ou non, ce n’est pas vraiment notre choix. Comme le dirait Ramesh, cela fait aussi partie du fonctionnement de la Totalité…


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